Le tribunal correctionnel de Bruges s’est prononcé sur opposition à un jugement rendu le 23 juin 2021.

Cinq prévenus, de nationalité iranienne ou inconnue étaient poursuivis. Plusieurs d’entre eux vivaient en Allemagne. Deux d’entre eux n’ont pas comparu à leur procès.

En mai 2020, deux prévenus étaient retrouvés par la section « traite et trafic d’êtres humains » de la police judiciaire fédérale dans leur voiture avec du matériel destiné au trafic d’êtres humains. Des informations de la police allemande ont révélé que d’autres prévenus avaient également été retrouvés avec du matériel dans leur voiture. L’un des bateaux achetés par un prévenu avait déjà été intercepté précédemment par les garde-côtes britanniques. La police allemande a fait savoir que plusieurs moteurs hors-bord avaient été achetés dans un magasin de sport bien précis. Dans un autre magasin, plusieurs bateaux avaient été vendus à la même personne. Sur les téléphones portables des prévenus, la police a trouvé des photos de bateaux et de gilets de sauvetage. L’un des prévenus achetait depuis longtemps des bateaux et des moteurs et organisait des opérations de trafic, même avec des Vietnamiens. L’enquête a révélé qu’entre août et septembre 2020, il avait acheté pour 10.000 euros de bateaux dans un magasin.

Les prévenus collaboraient avec une personne qui se trouvait à Calais et y recrutait des victimes pour les faire entrer clandestinement au Royaume-Uni en canot pneumatique contre rémunération. Les bateaux n’étaient pas en état de tenir toute la traversée. Le tribunal a apprécié les faits à la lumière de la recherche par caméra ANPR, des résultats des « retro-zoller », des résultats de la lecture des téléphones portables saisis, des conversations WhatsApp trouvées, des photos sur les téléphones portables de canots pneumatiques et de moteurs hors-bord, de photos de Google Maps, du fait que certains des prévenus avaient été surpris dans une voiture avec du matériel de trafic, des déclarations invraisemblables et contradictoires des prévenus.

Le tribunal avait jugé que les faits étaient établis et que les prévenus faisaient clairement partie d’une organisation criminelle. Ils ont écopé de peines de prison allant de six à douze ans et d’amendes allant de 96.000 à 240.000 euros.

Étant reparti en Iran, le troisième prévenu avait été condamné par défaut à un emprisonnement de 12 ans et une amende de 240.000 euros. Il a fait opposition au jugement. Lors d’une audition, il avait déclaré être un réfugié, une victime et avoir travaillé pour un donneur d’ordre afin de pouvoir faire la traversée vers l’Angleterre gratuitement.

Dans le jugement rendu sur opposition le 14 décembre 2022, le tribunal correctionnel de Bruges a estimé que le prévenu était le chef de l’organisation criminelle supranationale, étant donné qu’il prenait en charge les contacts avec les chauffeurs des bateaux ; l’envoi des localisations ; l’accompagnement des victimes sur les plages ; le contrôle des paiements ; le recrutement des personnes travaillant pour lui. Il ressort d’analyses de conversations WhatsApp que les anciens prévenus étaient soumis à ce dernier et qu’il possédait un réel pouvoir de décision.

Le juge a aussi pris en compte le fait que le trafic concernait également des victimes mineures. La période d’incrimination a été révisée afin de prendre en compte son retour en Iran à partir de juin 2020. Le tribunal l’a finalement condamné pour trafic avec circonstances aggravantes, notamment celle envers des personnes mineures, à un emprisonnement de neuf ans et à une amende de 80.000 euros. Une déchéance des droits a également été prononcée.

Un appel a finalement été interjeté contre le premier jugement du 23 juin 2021. La procédure d’appel n’impliquait que trois prévenus sur les cinq personnes concernées, deux de nationalité iranienne et un de nationalité allemande. Ce dossier a été rejugé par la cour d’appel de Gand le 9 mars 2022.